NOSTALGIE DE L’AVENIR (À l'époque de COVID 19)

La nostalgie est un phénomène présent dans chaque cœur humain.

Comme le dit un proverbe du peuple d'Ambundu (Angola) : « Tu ne peux pas effacer de ton cœur ce que tes yeux ont vu » !

En effet, lorsque nous nous déplaçons d'un endroit à un autre, nous portons dans nos bagages surtout la mémoire de notre terre et de notre peuple. Mais nous avons aussi la capacité de nous adapter à la nouvelle terre et de créer des relations avec d'autres personnes.

C'est pratiquement comme renaître, mais en même temps c’est avoir la conscience d'avoir déjà existé, d'avoir une histoire qui continue à être écrite dans de nouvelles pages. Ce sentiment naturel chez l'homme est vécu dans le présent en revivant les souvenirs du passé.

Mais parfois, lorsque la situation du moment nous pèse, la nostalgie du passé ne semble pas suffire à anesthésier notre douleur, nous ressentons aussi le besoin de vivre ce que nous n'avons pas encore réalisé. C'est très étrange, c'est comme s’il nous manquait quelque chose ou quelqu'un qui n'existe pas encore! Tout cela parce que nous refusons tout simplement d'accepter la situation dans laquelle nous nous trouvons et nous cherchons refuge en dehors de la vie réelle.

Mon passé n’était pas un fantasme, bien au contraire, j'avais un passé riche en amitiés authentiques qui ont fait de moi le Miguel d'aujourd'hui.

Parfois, nous vivons l'instant présent comme un lecteur qui lit un livre qui ne satisfait à ses attentes : il saute quelques pages parce qu'il pense mettre fin bientôt au cauchemar qui est entre ses mains pour lire le livre qui l'intéresse davantage !

Ces jours-ci, je vis un trilemme entre le passé, le présent et l'avenir.

Je suis angolais et, en tant que tel, mes racines culturelles sont communes à de nombreux africains, mais je viens de l'ancienne colonie portugaise. Je vis actuellement en Zambie, une ancienne colonie anglaise. Nos cultures africaines sont diversifiées en fonction des terrains que nous avons occupés dans les différentes parties de l'Afrique ! Et comme bonus pour accroître encore nos différences, nous subissons aussi des influences sur la façon dont nous pensons et agissons en fonction de nos anciennes colonies.

Je viens d'arriver en Zambie et je n'ai même pas eu le temps de goûter le plat typique de la région. Je me trouve comme tout le monde confiné entre quatre murs et je n’arrive pas à construire de nouvelles relations avec les gens de mon nouveau pays.

D'un moment à l'autre, je me retrouve presque sans terre et sans amis. Comme il ne m'est plus possible d'en trouver de nouveaux, je dois maintenant maintenir la distance recommandée par la sécurité publique.

Que faire ? Me prendre en otage sans que les ravisseurs ne demandent de me libérer ? Ou me faire prisonnier sans être condamné par le tribunal ?

J'ai décidé de vivre la vie avec ses peines et ses joies.

Ma première démarche a été de ne pas combattre le vent, car ce n'est pas à moi de l'arrêter. J'ai simplement accepté la situation dans laquelle nous sommes tous.

La deuxième étape consiste à faire place à la communion avec mes quatre compagnons de voyage qui viennent d'arriver comme moi en Zambie pour former le focolare : un Hollandais, un Kenyan et presque deux Italiens ! Oui, c'est bien ce que j'ai écrit : « presque deux Italiens » car l'un d'eux a passé trente et un ans à Fontem (Cameroun) dans un processus profond et intense d'inculturation dans une culture comme celle africaine, exigeante dans toutes les particularités de la vie et qui a laissé des traces indélébiles dans sa façon de penser et d'agir.

Troisième étape : j'ai organisé la journée. L'étude de l'anglais occupe la majeure partie de mon temps.

Je peux ainsi vivre mon trilemme avec plus de sérénité.

L'expérience du passé est très importante dans le processus de ma croissance en tant qu'homme et en tant que personne qui a donné sa vie ; mon avenir est écrit dans la pensée de Dieu, mais vivre pleinement l’instant présent est le seul moment où je peux aimer concrètement !

                                                                                                                         Miguel Tchicosseno